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 Interview du Commandant de la police lausannoise

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Minilady




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MessageSujet: Interview du Commandant de la police lausannoise   Interview du Commandant de la police lausannoise Icon_minitimeMer 6 Juin - 11:21

Il dirige depuis 2011 un service d’environ 600 personnes, des collaborateurs au métier exigeant, dangereux, à l’image contrastée, qui doivent désormais affronter, chaque fin de semaine, les débordements de fêtards avinés dans les rues de Lausanne. Ses troupes, en nombre insuffisant, sont au bout du rouleau, et leur patron craint désormais le pire. Interview.

Les actes de violence se multiplient, le sentiment d’insécurité augmente, une bagarre vire à l’émeute le 13 mai, et le scénario manque de se reproduire deux semaines plus tard. Etes-vous en train de perdre le contrôle de la vie nocturne à Lausanne?

Des événements comme ceux que vous évoquez sont extrêmement préoccupants. Ce n’est plus un service d’ordre que nous nous devons d’assurer mais, comme nous le disons dans notre jargon, carrément son maintien. Ce qui signifie que les policiers qui sont intervenus ce soir-là n’avaient pas l’équipement adéquat, contrairement à ceux qui sont mobilisés, par exemple, pour un match de foot. Quand ils sont arrivés et qu’ils ont reçu les premières bouteilles, ils ont dû battre en retraite, afin de s’équiper, de mettre au moins les casques. Ils ont eu raison de le faire, puis de tirer des balles en caoutchouc: en quelques secondes, la situation avait changé, et les risques qu’ils ont courus ont été majeurs. C’est une situation inacceptable.

Les policiers étaient environ une quarantaine, mais personne n’a été arrêté ou interpellé. Comment doit-on le comprendre?

J’ai immédiatement demandé un rapport à l’officier qui dirigeait l’intervention: aujourd’hui, je n’ai aucun reproche à lui faire. Avec les moyens à disposition et la dynamique des événements. il pouvait difficilement faire mieux. Les policiers ont fait face à plusieurs fronts, mouvants, et largement supérieurs en nombre. Ils ont évité le pire: s’ils avaient pris le risque d’interpeller quelques individus, cela aurait mobilisé trop d’agents et peut-être provoqué un drame.

Les policiers qui sont intervenus vous ont-ils dit à qui ils ont eu à faire?

Nous sommes parvenus à repousser les différents groupes, et ils sont partis en direction de la gare, où les échauffourées ont repris. Après quoi, les individus ont pris, majoritairement, des trains en direction de Fribourg et Neuchâtel. Il y avait toutes sortes de personnes, dont semble-t-il pas mal d’étrangers, d’après ce que mes collaborateurs ont vu et entendu.

L’heure blanche est présentée comme une solution. Il n’empêche que les fêtards ne rentrent pas tous à 5 h., que nombreux sont ceux qui continuent à traîner, ivres et excités. Pensez-vous toujours qu’il s’agit d’une mesure adéquate?

Il nous faut encore du recul, parce que nous ne l’avons testée que sur la période hivernale. J’attends de voir, avec une certaine inquiétude, ce qui va se passer quand il fera encore 20 degrés à 4 h. du matin…

Lausanne compte une quarantaine d’établissements nocturnes. Est-ce trop? Etes-vous favorable à une réintroduction de la clause du besoin?

La question est politique, et je ne peux donc pas y répondre. Ce que je peux vous affirmer, c’est qu’il faut à tout prix calmer la nuit lausannoise. Nous sommes au bout du bout de ce que nous pouvons assumer: quand la police doit intervenir comme elle l’a fait la nuit du 13 mai, avec une telle intensité, tirer des balles en caoutchouc - et pas contre des hooligans, mais bel et bien contre des gens censés s’amuser! -, le mal est profond, c’est un problème de société qui ne peut être résolu par la seule police.

Si l’on réduit les lieux de fête, il y aura toujours autant de monde qui se déversera dans moins d’endroits. Ce sera pire, non?

Il faut rendre Lausanne moins attrayante la nuit, et je ne sais pas, franchement, si cela signifie, par exemple, passer de quarante à trente-cinq établissements… De mon point de vue, ce n’est pas qu’une question de nombre: moins de lieux, moins de gens. Si nous raisonnons en matière de quantité, c’est la consommation d’alcool qu’il faut réduire, drastiquement.

Il ne s’agit plus seulement d’un problème de sécurité publique, qui est immédiat, mais de santé publique, à plus long terme. Dans dix ans, que seront devenus ces jeunes qui sont ivres morts tous les week-ends?

30 000 personnes afflueraient à Lausanne chaque fin de semaine. Est-ce un chiffre crédible ou une estimation à la louche, qui additionne les clients de lieux divers? Ce sont des estimations. Encore une fois, le problème n’est pas le nombre de personnes, mais leur nature: Lausanne peut fort bien absorber bien plus de jeunes si tous s’accordent pour ne faire que la fête, sans débordements, et surtout sans se livrer à une consommation d’alcool aussi dramatiquement massive.

Les fauteurs de troubles, à force, vous les connaissez, non? Pourquoi ne pas les neutraliser à l’arrivée?

C’est exclu, ce sont des citoyens lambda. Nous ne pouvons pas arrêter les gens préventivement, sans aucune base légale. Et quand bien même nous l’aurions, cette base, que faire devant un afflux aussi important? Impossible d’interpeller 500, 1000 personnes, voire plus. Ce n’est d’ailleurs pas l’esprit de notre action.

Dans deux ans, la police lausannoise comptera une trentaine d’agents de plus. Après le tableau que vous venez de nous brosser, on peine à imaginer que ce sera suffisant.

Cinq arriveront cette année déjà, les vingt-cinq autres en mars 2014: ça ne va pas être facile de tenir jusque-là, à vrai dire. Nous allons devoir renoncer à certaines choses. Mais au-delà de ces considérations, et des besoins qu’on connaît, mon devoir de réserve m’interdit de m’exprimer sur les chiffres.

Les effectifs sont une chose, leur affectation en est une autre. Police secours compte 144 agents, Trafic et stationnement 128. Est-ce un ratio correct, à vos yeux?

Vos comptes ne sont pas justes, parce qu’il y a 52 assistants de sécurité publique au sein de Trafic et stationnement: on ne peut donc pas comparer les deux totaux. De surcroît, il y a aussi les équipes qui s’occupent des accidents, et je peux vous assurer qu’elles ne chôment pas. S’il y a des synergies possibles, elles ne sont pas si nombreuses.

Au sein de la police lausannoise, deux cadres sont entièrement dévoués au contrôle de l’éthique et de la déontologie, assistés par une secrétaire. A l’heure où ça chauffe dans les rues, est-ce de l’argent judicieusement dépensé?

On ne peut pas présenter les choses comme cela! Ces personnes sont en poste depuis 2002 et 2007, respectivement: ce ne sont pas des chefs et n’ont aucune fonction opérationnelle. Compte tenu de leurs années de service, ils ne pourraient d’ailleurs pas être à police secours pour aller batailler dans les rues. Pour le reste, je réfute absolument l’idée selon laquelle notre état-major serait pléthorique: gérer un corps de police est une tâche complexe, exigeante. Nous venons de le réorganiser afin de lui donner une meilleure logique opérationnelle, et aucune force n’a été gaspillée.

Pourtant, sur le terrain, les hommes et les femmes sont débordés, à bout de forces, les démissions se multiplient - 18 depuis le début de l’année. Que pouvez-vous faire?

Nous avons aussi des retours au sein du corps de police et, contrairement à un bruit qui court, nous ne manquons pas de candidats: notre recrutement pour la prochaine académie marche bien. Quant à la réponse à votre question, elle est simple: il nous faut des moyens supplémentaires. Nous sommes passés de 16 788 interventions en 2000 à 35 812 en 2011 et, en 2010, nous en étions à 30 448. Une augmentation de l’activité de 18%, en un an, avec un effectif inchangé! De surcroît, la nature et l’intensité des interventions ont également évolué, devenant de plus en plus dures. Cette année, nous sommes partis pour atteindre les 40 000 interventions: en 27 ans de métier, je n’ai jamais connu une situation aussi délicate.

J’imagine que vous êtes d’accord de dire que les agresseurs de policiers ne sont pas punis assez sévèrement. Mais trouvez-vous que vos troupes sont suffisamment bien défendues par leur hiérarchie, dans leur activité quotidienne?

Il est intolérable que l’on s’en prenne aux policiers, que ce soit par oral ou, pire, physiquement. Je ne l’accepte pas, et j’encourage mes collaborateurs à dénoncer les cas, à ne pas les banaliser, ce qu’ils risquent de faire avec le temps. Je suis derrière eux quand ils sont victimes de violences, je suis derrière eux quand ils doivent légitimement faire usage de la force - comme lors de l’émeute du 13 mai. Là où je ne les soutiens plus, c’est s’ils font usage de la force de façon illégitime, par exemple sur un individu qui est déjà maîtrisé. Il faut que vous sachiez que si un policier donne une claque à quelqu’un, c’est un abus d’autorité. Légalement, je n’ai pas le choix: je dois le dénoncer. Après, c’est au procureur d’apprécier la gravité de la faute. Encore une fois: si je n’interviens pas, je suis complice d’un acte pénalement répréhensible.

Du coup, des policiers affirment vivre dans un climat de suspicion, et ils aimeraient notamment pouvoir bénéficier d’un avocat dès la dénonciation.

On y travaille, et je m’y étais d’ailleurs engagé en prenant le commandement du corps de police. Nos juristes sont désormais chargés d’évaluer la gravité du cas, afin de permettre au collaborateur de disposer d’un soutien dès la première audition devant le procureur, si nécessaire. Franchement, quel intérêt aurais-je à ne pas vouloir protéger mes troupes, à ne pas faire en sorte qu’elles soient bien défendues? J’en ai tellement besoin!
(24 heures)

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